Quand on aime les chevaux on peut rester des heures à les regarder, à imaginer leur caractère, à les « ressentir ». Chaque cheval nous renvoie une émotion. Et si on prend le temps, en silence, d’écouter notre petite voix intérieure, il y a parfois une idée qui s’impose. Il m’est arrivé d’être persuadée qu’un cheval éprouvait une douleur dans le dos alors qu’il ne présentait aucun signe mécanique ou d’éprouver une terreur panique en essayant une jument alors qu’elle m’obéissait normalement en apparence et de découvrir par la suite que cette même jument était dangereuse et avait failli tuer le cavalier qui l’avait achetée en prenant le mors au dent et en fonçant droit devant par dessus barrières, routes et voitures… L’intuition est une des qualités que doit avoir un cavalier et il faut l’exercer.
J’ai entendu des chercheurs dire récemment que le cheval avait une intuition 14 fois plus développée que la nôtre….Alors… J’ai commencé par me demander ce que mes chevaux avaient dû ressentir en me rencontrant et soudain j’ai réalisé que chacun des chevaux importants de ma vie avaient eu un caractère qui correspondait à l’état d’esprit des lequel je me trouvais à ce moment là. Tous ces chevaux que j’avais pensé améliorer, à qui j’avais apporté une musculature et une technique, que j’avais cru éduquer et dresser, étaient en fait arrivés quand j’avais besoin d’eux. Mon premier cheval de compétition m’a aidée à vaincre ma peur des obstacles, mon premier cheval de grand prix m’a donné le goût pour la haute compétition, ensuite et venu celui qui m’a donné la combativité dont je manquais, et quand j’ai été prête à former un cheval, j’ai rencontré une jument exceptionnelle mais particulièrement difficile qui m’a demandé des années de travail. Puis est venue l’époque du simple plaisir et j’ai enfin trouvé le pur sang léger et facile dont je rêvais. Enfin est arrivée l’heure de la retraite, et j’ai eu, comme par hasard, un cheval extrêmement fatigant à monter qui m’a ôté l’envie de la compétition.Et si c’était les chevaux qui nous évaluaient, qui nous dressaient et non le contraire ? Inversons les rôles. Demandons-nous pourquoi les chevaux que nous aimons ont telle ou telle particularité, et plutôt que de vouloir à tout prix calmer un cheval nerveux, donner du sang à un cheval qui en manque, ou rendre souple un cheval raide, demandons-nous d’abord pourquoi il est avec nous à ce moment de notre vie. Qu’avons-nous besoin d’expérimenter ? Quel travail devons-nous faire sur nous-mêmes ? De quoi avons-nous besoin ? Et au lieu d’essayer de LE comprendre, cherchons ce qu’il essaie de NOUS faire comprendre. Les chevaux sont des médiums et chaque cheval est un maître, ne l’oublions pas !
Article paru dans Cheval Pratique en février 2014